Alors que l’intelligence artificielle et l’innovation numérique ouvrent de nouvelles perspectives de croissance, l’inclusivité devient un enjeu crucial.
Alors que le Sénégal ambitionne de devenir un leader du numérique en Afrique, la croissance partagée passe par des approches inclusives. Les start-up accompagnées par le projet NTF V du Centre du commerce international (ITC) ont renforcé leur compréhension des normes qui permettent de rendre les technologies accessibles à tous.
Le défi de l’accessibilité numérique au Sénégal
Le Sénégal a lancé un « New Deal technologique » visant à devenir un leader du numérique en Afrique d’ici 2050. Alors que l’intelligence artificielle et l’innovation numérique ouvrent de nouvelles perspectives de croissance, l’inclusivité devient un enjeu crucial. Comment construire une société plus prospère sans garantir à tous ses citoyens un accès équitable aux technologies de l’information et de la communication ?
Depuis plus de dix ans, cette question anime l’engagement d’Amath Ndiaye, cofondateur de Bakhtech. En France comme au Sénégal, Bakhtech associe technologie et solidarité pour améliorer le quotidien des personnes en situation de handicap — qu’il soit physique, sensoriel ou mental.
« Selon l’OMC, 16 % de la population mondiale est touchée par un problème de santé invalidant. Et cette proportion est encore plus élevée dans les pays en développement. Il faut donc en faire davantage. L’ambition de Bakhtech est de rendre la technologie perceptible, utilisable et compréhensible par tous », explique-t-il.
Les pays du Sud ignorent trop souvent les normes internationales en matière d’accessibilité numérique. Cela a de lourdes conséquences pour les personnes en situation de handicap, dans un monde où le numérique structure de plus en plus notre rapport à la société.
« L’enjeu, c’est de préserver l’autonomie, la liberté et l’employabilité des personnes handicapées. Saviez-vous que les métiers de kinésithérapeute et d’informaticien sont parmi les plus prisés chez les personnes aveugles ? Je me souviens d’un kiné non-voyant qui, du jour au lendemain, n’a plus pu exercer car son logiciel métier avait été mis à jour et n’était plus accessible. Le numérique ne doit pas être une menace pour l’emploi, mais une opportunité », souligne Ndiaye.
Marieme Soda Sall est directrice de SAMRES Sénégal, un centre d’appels qui propose des services de mobilité à des utilisateurs suédois en situation de handicap.
« Vivre avec un handicap au Sénégal, c’est vivre en marge de la société », dit-elle. « La technologie devrait davantage être au service des personnes. SAMRES Sénégal montre que c’est possible. Grâce aux outils numériques, nos opérateurs peuvent dépasser les distances géographiques, les barrières linguistiques et culturelles. Basées à Dakar, nos équipes offrent chaque jour des services de qualité à des clients suédois en situation de handicap. »
Transformer l’accessibilité numérique en levier de croissance
SAMRES Sénégal suit de près les évolutions technologiques qui transforment le monde du travail.
« Les principes d’accessibilité mènent souvent à des conceptions plus claires, une navigation plus logique et une meilleure organisation des contenus, ce qui profite non seulement à nos clients, mais aussi à l’ensemble des utilisateurs », explique Sall. « Pour nous, il s’agit d’être plus efficaces, mais aussi de faciliter la collaboration avec nos partenaires internationaux, pour qui ces standards sont incontournables. »
En tant que formateur, Amath Ndiaye a animé un webinaire le 25 mars. Des sessions de coaching individuel sont prévues pour les entreprises souhaitant aller plus loin.
« Bakhtech a développé une solution basée sur l’intelligence artificielle, capable de détecter automatiquement les erreurs d’accessibilité sur n’importe quel site », précise Ndiaye. « Adopter les standards d’accessibilité universelle n’est pas seulement une question de responsabilité sociale ou d’éthique. C’est aussi un moyen de renforcer son image de marque en affichant un engagement sociétal fort. »
Il se réjouit de la réponse positive des entreprises ayant suivi la formation.
« Mon espoir, c’est que le Sénégal devienne un modèle d’inclusion numérique en Afrique de l’Ouest, voire au niveau international. Pour cela, il faut que tout le monde s’implique sur la question du handicap. Et même s’il reste du chemin, les entreprises commencent à comprendre qu’elles peuvent être des actrices du changement et contribuer à faire émerger un écosystème numérique inclusif. »